Il ne faut pas s'arrêter à sa coupe carrée et à ses vêtements sombres. Cindy Gallop vous surprendra. Comme elle a surpris le public de Ted en 2009 en prononçant à plusieurs reprises les mots « cum on my face » dans son talk. Pubarde aguerrie désormais startuppeuse, elle se définit comme « celle qui fait tout péter, la Michael Bay du monde des affaires.» Après avoir fait sauter les verrous de l'entreprise avec IfWeRanTheWorld.com, Cindy s'attaque au s**e. Pa**ez à la micro-action Cette ressortissante britannique, qui a grandi en Asie et vit aujourd'hui à New York, ambitionne de changer les règles. C'est logiquement le sujet de sa première startup, IfWeRanTheWorld.com, une plateforme mettant en relation des bons samaritains, ou des super héros, comme elle les appelle. Le concept : le monde irait mieux si tous ses problèmes étaient réduits à des micro-actions, des actions si simples et évidentes qu'additionnées, elles font de grandes choses. On l'aura compris, Cindy Gallop croit au pouvoir collaboratif, à la co-action. « Le meilleur exemple reste les révolutions arabes, et personne encore n'imagine une telle force appliquée au business », lance-t-elle. Muée par un pragmatisme tout anglo-saxon, l'évangélisatrice veut appliquer ce modèle au monde des affaires. Avec Cindy, fini le capitalisme de papa ! Fini aussi ces entreprises qui font semblant. « Leur futur est de faire des profits et du bien simultanément », annonce-t-elle. D'ailleurs, chez elle il n'y aucune ambiguïté dans sa définition des profits. Ils sont aussi bien financiers que sociaux. On est tenté de lui demander de descendre de l'arbre à bisous. Mais on ne l'y trouvera pas, son œuvre a déjà commencé avec sa nouvelle startup : MakeLoveNotp**n.tv (MLNP.tv). Pour prouver qu'elle est dans vrai, rien de tel que de s'attaquer à un domaine concret mais délaissé : le s**e. Cette autre plateforme permet aux couples du monde entier de mettre en ligne les vidéos de leurs ébats avec un partage du plaisir et des revenus à la clé. Ça c'est pour le versant financier. Le véritable but de ce projet : montrer à quoi ressemble le « vrai » s**e et provoquer un débat dans notre société sur les tabous qui l'entourent. L'ambition de Cindy Gallop apparaît alors en creux : envoyer valser les conventions et « se foutre de ce que le monde en pense ». Mid-life crisis L'histoire a tout d'une renaissance comme on les aime outre-Atlantique. En 2005, elle fête ses 45 ans. C'est l'occasion de faire le bilan calmement. Fille de pub, elle est alors présidente de la filiale américaine de Bartle Bogle Hegarty (BBH), agence de pub qu'elle avait intégrée 16 ans plus tôt. Mais cette année 2005 sera différente, elle en a décidé ainsi. La suite de l'histoire est facile à deviner. Elle ne veut plus jamais faire la même chose pour les 16 prochaines années. Elle démissionne. Le saut dans l'inconnu. « Je me réinvente tous les jours dans tous les sens, y compris financièrement », précise-t-elle. Avant de fanfaronner, Cindy Gallop est confrontée au rejet des « seniors ». Mais elle se fait très vite une raison. Tant pis pour l'ancien monde. Partisane du « travailler pour soi », elle embra**e l'idéologie des startups. Pro-love, Pro-p**n, Pro-knowing the difference Cindy Gallop définit sa vie comme un enchaînement d'accidents. Et MLNP.tv ne déroge pas à sa règle. Dans la foulée de sa remise en question, elle fréquente des hommes plus jeunes qu'elle, dans la vingtaine. Encore un saut dans l'inconnu. Elle l'aurait probablement imaginé autrement. Ces jeunes hommes avaient des attentes très précises et pas trop innocentes. Elle explique ce décalage par l'abondance aujourd'hui des images p**nographiques en ligne, mais aussi par le puritanisme de notre société, qui se refuse à tout débat autour du s**e. « Le p**no devient par défaut l'éducation s**uelle d'aujourd'hui », soupire-t-elle. Et, comme Cindy Gallop ne se laisse pas démonter aussi facilement, elle lance MakeLoveNotp**n.com, un site visant à déconstruire les idées reçues sur la s**ualité héritées du p**no, qu'elle présentait dans son talk décapant chez Ted, en 2009.
Cette première mouture a un retentissement mondial et immédiat. Mais Cindy veut aller plus loin, elle veut changer les choses. Elle va aller là où personne ne veut aller. Monter une plateforme de partage de vidéos p**nographiques avec des sentiments dedans. Son site ne se veut pas anti-p**nographie. MNLP.tv célèbre avant tout la beauté de l'acte, sa légèreté, sa simplicité. Il oppose les images du monde réel à celles fabriquées par l'industrie p**nographique. N'importe qui peut alors devenir une « MakeLoveNotp**nstar » et soumettre sa scène d'amour. Son équipe et elle-même s'occupent de la curation : des heures de visionnage pour attester de la véracité des vidéos mises en ligne. « Le site est fait pour toutes les personnes qui pensent que le vrai s**e sera toujours plus beau que le p**no ne pourra jamais l'être », proclame-t-elle. La cause du siècle Alors quand on lui demande quelle sera sa prochaine cause, Cindy a**ure sans sourciller que le s**e est LA cause. Exit la cheffe d'entreprise, Cindy Gallop se rêve en pédagogue, une version rock and roll de l'infirmière de collège, qui a**urait le cours d'éducation s**uelle à grands renforts de vidéos animalières et de fruits exotiques. « Les professeurs et les parents sont tellement gênés d'en parler qu'ils ont besoin de ressources », lance-t-elle. À l'entendre, il y a urgence. Avec le web, les enfants sont exposés de plus en plus tôt au p**no (onze ans aujourd'hui). Droite dans ses bottes de cuir (sa collection de chaussures fait le bonheur des magazines spécialisés), elle en est persuadée : la prochaine révolution sera s**uelle. Sinon, comment expliquer ses galères avec les investisseurs, les banques et la Silicon Valley ? Personne ne voulait d'un projet qui abordait aussi frontalement les questions de s**ualité et qui comportait le terme « p**n ». La réticence des acteurs de la « new economy », PayPal et Amazon en tête, l'a bien plus froissée. « La Silicon Valley accueille les innovations les plus disruptives dans tous les domaines, sauf… le s**e ! », persifle-t-elle. Tout joue contre elle, mais sa motivation n'en est que décuplée. « Je refuse de changer de nom, par exemple ; je ne veux pas renforcer les clichés et les préjugés que je combats », affirme-t-elle. L'exception culturelle Derrière cette bataille contre les idées reçues se cache aussi la volonté de redonner à chaque pays son identité nationale en matière de s**ualité. Aujourd'hui, le p**no, qui fait l'éducation du monde, est issu de la vallée de San Fernando en Californie, aussi connue sous le nom de « San p**nando Valley ». Cette hégémonie américaine influence chaque pays dans ses pratiques et dans son industrie p**nographique. Pourtant, en ayant vécu et voyagé, Cindy Gallop est persuadée que les gens font l'amour différemment à travers le monde : « les traditions et les coutumes existent autant que dans la cuisine.» D'après elle, chacun doit faire valoir ses particularismes culturels. Le ciel soit loué, les Français sont bien placés selon Cindy. C'est d'ailleurs pour cela qu'elle recherche des partenaires, financiers cette fois-ci, pour lancer un MLNP France. À bons entendeurs...